Sommaire
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Dédicace - de Jean BONERE
Et si nous arrêtions - de Jean BONERE
Grand-Mère Kal - de Lyliane Mussard
Je voudrais être ... - de Béatrice Técher
L'enfant noir - de Lyliane Mussard
Mi rêve un pays - de Christelle Grondin
Mon petit Jardin - de Jean BONERE
Paroles de Kalla - de Christelle Grondin
Mi rêve un pays
Mi rêve un pays
Où ça tout l’monde
Y sent
Que lu compte pou les autres,
Où, ça qu’y travaille n’a un salaire
Où, ça qu’y travaille pas y gagn’ pas la honte.
Un pays où tout’ qualité métier
L’est apprécié :
Ouvrier
Râleur de pioche
Femme de ménage
Pareil que professeur
Médecin
Avocat.
Zot’ tout’ n’a droit un sourire
Un’ poignée d’ main
Un’ parole
Un bonjour.
Un pays où ça aussi
Ça qui travaille pas
Y garde l’espoir,
Y connait la joie
Vivre dans un’ maison
Dans un quartier
Dans une ville
Où ça tout l’monde
L’est capab’ regard’ à zot en face
Demand’ à zot’ nouvelles
Soutenir à zot’
Dans zot’ chômage.
Un’ ville où ça zot même même
Y gagn’ courage
Pou viv’ cœur clair
Et rend’ service
A tout’ ça qu’nana soucis
A cause zot’ même
A cause la vie
A cause le chômage
A cause l’insécurité,
A cause tout simplement
Le tracas qu’tout l’monde nana
Devant l’avenir
Devant la mort
Devant le ciel, l’enfer, la souffrance, le malheur.
Un pays comme ça
L’est press’ un paradis.
Ou bien encore comment y dis ?
Un l’utopie.
Ce manqué pays-là
La Réunion même premier modèle demain !
Mois l’a pas sùr, mi peux pas dire ça,
Mais ça qu’mi connais
C’est que ça qu’ou l’a pas rêvé
Ou gagnera jamais arranger
Christelle GRONDIN
Paroles de Kalla
C'est Kalla qui parle à l'auteur, à partir du monde invisible
Tu n'aurais pas cherché secours auprès de morts
Si tu l'avais trouvé aux côtés des vivants.
Dans le monde d'en bas, tu as besoin des forts ;
Ce sont les mêmes, hélas, qui font les ignorants.
Ils découvrent soudain que tu es trop humaine
Et versent une larme sur leur cécité.
Mais aussitôt repris, ils retournent sans peine
A leur indifférence et à leur vanité.
Chez nous, la volonté se pare de sagesse
Jamais prise en défaut lorsque nous agissons.
Quand un homme est trop seul pour une œuvre maître
C'est bien pour le servir que nous l'accompagnons.
Ecoute avec patience les hommes qui jugent.
Ils ont peur de la mort et de la vérité.
Pardonne-leur pourtant, car ils n'ont pour refuge
Que la jouissance vile, ou la férocité ...
Tu connaîtras aussi l'ami velléitaire
Qui comptera les points, mais sans prendre parti ;
Tranquille et bienheureux, à l'abri du parterre
Non, il n'applaudira pas moins ton ennemi.
Pourquoi leur en vouloir ? Comme eux tu as manqué,
Et comme eux tu attends d'être enfin reconnue
Puisqu'ils doutaient d'eux-mêmes, ils n'ont pas appelé ;
Tu as frappé longtemps, nous t'avons entendue.
Avec pour toutes armes la tendre piété
Pour les hommes mortels, et la belle impatience
De voir s'accomplir le rêve d'éternité
Tu as franchi les portes de la connaissance.
Le Schéol a frémi, et moi-même éveillée,
Je ne veux plus surseoir pour quitter mon repos.
Me voilà toute prête, et comme toi armée
Pour préparer les saints aux gestes des héros ...
Regarder dans les yeux son enfant ou son frère
Et dire avec amour le reproche qu'on fait,
Fort de ses convictions, face à son adversaire,
Par un discours loyal le vaincre d'un seul trait,
Voilà ce qu'en son âme, l'homme doit apprendre.
Notre tâche consiste à le lui inspirer.
Comme une récompense qui vient sans attendre,
De l'humour par surcroît il saura disposer.
Ce sont les qualités des hommes d'avenir.
Je te fais à présent don de la clairvoyance
Qui te fera gagner mais sans faire souffrir :
Celui qu'on a blessé ne veut que la vengeance !
Ces vertus sont trempées au pays souterrain
Où ne vont pas que les morts. Dans l'île créole
On entend nuit et jour les enfants de Vulcain
Ciselant, du futur, la splendide auréole.
Christelle GRONDIN
L’enfant noir
Dans une case
Ouverte à tous vents,
La négresse Annabase
A mis au monde un enfant.
Pour lui, point de couffin,
Ni tulle, ni dentelle,
Ni brassière de toile de lin …
Seulement des roucoulements de tourterelle.
Il n’a pour berceau
Qu’un peu de paille
Et pour trousseau
Un pauvre pagne.
Ses yeux ouverts sur la vie
Voient le visage ravi
De sa mère, la noire marronne
Qui prie pour lui la madone.
Cette petite boule noire,
Symbole d’amour et d’espoir,
Aujourd’hui, sourit à la ronde …
Demain, découvrira les folies de ce monde.
Lyliane MUSSARD
Grand-Mère Kal
Une mèche pâle
Ruisselle sur le hâle
De sa joue décharnée
Et lui donne un air pathétique
Au milieu des dalles antiques.
L'esclave Kal,
Dans un parfum de santal,
Vient psalmodier
Des prières à son maître dédiées ...
De Frohen, Mahavel ...
Cela tourne dans sa pauvre tête ...
Que fait-elle dans ce monde irréel ?
Elle se souvient d'un soir de fête
Où dans le foyer incandescent
Elle jetait par poignées, de l'encens,
Du camphre et du benjoin.
Que tout cela est loin ...
Il lui faut remonter le temps:
Dix ans, cent ans, peut-être deux cents ans ...
Après tout, qu'est-ce que ça peut faire ?
Elle recueille dans ses mains déformées
Une motte de terre
Où la rosée a tissé
Une résille arachnéenne ;
Elle en respire l'odeur, les yeux fermés,
Et comme en une communion païenne,
La porte à ses lèvres jusque-là figées ...
Puis prenant sa cassolette,
Encense la dalle d'un air affligé.
Le cri du touc-touc la surprend
Et brutalement, elle comprend.
Devenue fantôme,
Elle erre depuis la nuit des temps
Parmi les hommes.
Elle sait qu'elle fait peur aux petits enfants.
La vieille femme les aimait pourtant!
Que peut-elle hélas, à part ses incantations
Contre cette étrange croyance ?
Elle est restée ma grand-mère Kal,
Cette attachante dame
Liée à un rite ancestral
Qui fit le bonheur de mon enfance.
Lyliane MUSSARD
Mon petit jardin
Tout y est grandiose, tout y est délicieux,
Dans mon petit jardin qui lentement s’éveille.
Belle Flore, aujourd’hui, plus prompte que l’abeille,
A si bien étalé ses dons mystérieux.
Plus diapré qu’un tapis du lointain Orient,
Il sourit au matin, chatoie comme une opale,
Donne de doux reflets aux larmes matinales,
Etale sous mes yeux ses charmes attrayants.
Voyez ce papillon qui soudain apparaît,
Il hasarde son vol, hésite, puis se pose
Dans l’ample corolle d’une soyeuse rose,
Y aspire une manne et soudain disparaît.
Là, perché sur son trône et plus hautain qu’un roi,
Un grand lys vaniteux déploie sa blanche robe.
Et pourquoi cet orgueil, puisque demain à l’aube,
Ses attraits par terre seront en désarroi ?
Petite violette, pourquoi cette froideur ?
Relève la tête, ne sois pas si timide
Sinon tu prendras froid dans tes feuilles humides.
Montre donc ton visage aux premières lueurs.
L’agonie est rude pour toi dahlia carmin,
Tu frissonnes de peur à la moindre des bises,
Et à chaque frisson, sur le gazon frais gisent
Tes tristes pétales, las d’attendre demain.
Là-bas, toute effarée d’être une simple fleur,
Une pensée rêveuse et toute jeune encore
Jette un tendre regard et remercie l’aurore
D’avoir donné le jour à son sensible cœur.
Jardin, de voyages je n’en ai nul besoin,
Car tu es à toi seul un minuscule monde.
Chacun de tes massifs est une ile féconde,
Un petit continent cultivé avec soins.
Sans toi mon beau jardin, je serais malheureux.
Pare-toi jour et nuit si précieux tu veux m’être,
Ne cesse d’abreuver au profond de ton être,
Abeille capricieuse et papillon gracieux.
Souris au gai soleil, offre-moi tes senteurs,
Bois la claire rosée et trésaille à la brise
Qui d’un souffle léger à chaque instant te grise.
Enfin, laisse mourir une à une tes fleurs.
Jean BONERE
Dédicace
J’aimerai vous dédier un poème Madame,
Un simple poème tout rempli de mon cœur,
Pour vous dire combien, au profond de mon âme,
Vous y avez semé une inviolable fleur.
J’ai envie de crier, à la face du monde,
L’estime que je dois à vos simples raisons,
Vous qui avez fait don, à ma vie vagabonde,
D’un meilleur univers, d’un plus bel horizon.
Merci d’avoir levé un pan du sombre voile
Qui recouvrait mes yeux habitués au noir,
De m’avoir réappris à entendre et à voir,
D’avoir été pour moi comme une bonne étoile
Et de m’avoir trempé, sans jamais me forcer,
Dans le sel d’une vie dont j’en avais assez.
Jean BONERE
(A Madame Cornu, mon professeur de français, qui m’a donné le goût de la littérature)
Et si nous arrêtions
Et si nous arrêtions, l’espace d’un instant,
Notre course effrénée à la consommation,
Pour faire le bilan de nos obligations ;
A ne pas hésiter, nous nous surprendrions.
Quels sont nos résultats, quelle est notre richesse,
Qu’avons-nous entassé au fil de ces années ?
Et qu’avons-nous donné de notre connaissance,
Pour trouver nos enfants tellement démunis ?
Pourquoi les jetons-nous à chaque instant qui passe,
Dans la drogue, l’alcool, l’horreur et la violence ?
Quel cliché donnons-nous pour les perdre à jamais ?
Pourquoi ont-ils si peur de vivre parmi nous ?
Assez de mains tendues pour une vie facile,
Tendons plutôt nos mains pour donner aux enfants,
Non pas le dernier cri des rayons alléchants,
Mais un peu plus de temps et un peu plus d’amour.
Donnons également de notre vigilance,
Car les gourous sont là, les dépravés aussi,
Qui changent nos enfants en effrayants zombies,
Alors que nous voulons en faire des adultes.
Prenons part au projet défini par l’école,
Pour qu’il soit en tout point conforme à nos désirs,
Refusons aux pervers l’éducation des jeunes,
Rassurons nos enfants chaque jour de leur vie.
Jean BONERE
(Texte écrit en 1994, à l’époque où j’étais président de l'Union Départementale
des Associations de Parents d’Elèves de l’Enseignement Catholique.
Face au djihadisme, il est aujourd’hui d’une cruelle actualité !)
Je voudrais être...
Je voudrais être un phare,
Un phare
Dans la nuit,
Pour vous éviter les écueils de la vie.
Je voudrais être un cocon,
Un cocon
Très doux ,
Pour vous mettre à l'abri de tout.
Je voudrais être une fée,
Une fée
Qui fait
De tous vos rêves, une réalité.
Mais je ne suis qu'une maman,
Votre maman
Qui ne souhaite, de tout son cœur,
Que votre bonheur.
Béatrice Técher